La coupe de cheveux, moyen d’expression dans les favelas !

Pour s’exprimer, il n’y a pas que les saraus et le Passinho ! Toutes plus originales et extravagantes, les coiffures cartonnent et rassemblent dans les favelas du Brésil. C’est à celui qui trouvera la coupe la plus recherchée. Têtes à moitié rasées, stylisées avec des motifs, des écritures, des logos parfois, et/ou des teintures flashy. Des looks dignes de certaines stars du foot !

Hick Duarte, jeune photographe de 25 ans, s’est intéressé de plus près à cette mode capillaire. Il s’est immergé dans l’univers des chavosos, ces jeunes favelados qui se démarquent par leur style et leurs passages répétés chez le barbier. Ce style, travaillé, est à mi-chemin entre le rebelle et le branché. Un style inspiré des chanteurs de funk ostentação[1], et customisé à l’infini ! N’ayant pas de quoi s’acheter des vêtements de marque (pour imiter leurs modèles fortunés), c’est avec leur (absence de) chevelure que les chavosos jouent.

Une série de clichés représentant les chavosos de São Paulo a été mise en ligne sur le site de Hick Duarte.

Chavosos-©Hick Duarte-Anacaona

Chavoso ©Hick Duarte


Chavosos-©Hick Duarte-Anacaona3

Chavoso ©Hick Duarte

Cette tendance, créatrice de lien social, n’est pas inconnue chez nos éditions ! Jessica Oliveira, auteure Anacaona et membre du collectif Je suis Rio, a écrit dessus avec beaucoup d’humour ! Voici un extrait de sa nouvelle « Rio de Janeiro / New-York » :

« T’es déjà allé au Consulat des Etats-Unis ? Là-bas, c’est interdit de rentrer avec un portable, […] alors tu dois le laisser à quelqu’un à l’extérieur et prier pour que ta coupe de cheveux parte pas en free-style parce que tu peux pas te regarder une dernière fois dans ton écran avant qu’ils tirent ton portrait. Et ce jour-là, bien sûr, laisse tomber la vieille coupe que j’avais.

Pour mes cheveux, je vais chez Mocreia, un salon de Vilar Carioca, le quartier où j’habite. Le patron s’appelle Gilsin, le mec est moche à faire peur mais il s’y connaît comme personne pour manier le X Tabillys, un produit très, très chimique mais qui te lisse les cheveux, pur swag. Tout le monde se fait coiffer chez lui. D’abord, Mocreia te fait un rasé dégradé, en laissant de la longueur sur le dessus. Puis il prend le bonnet à mèches et, avec une aiguille à tricoter, sort les mèches qu’il décolore à l’eau oxygénée. Va chez Mocreia le samedi matin bien tôt : tu verras un paquet de mecs assis sur le trottoir, prenant le soleil pour décolorer leurs cheveux plus vite. Ensuite, il t’égalise les pointes et les lisse avec le X Tabillys. Et voilà, cousin, une pure coupe. Sur Facebook, Gilsin Mocreia, il a plus de 8000 fans ! Mais ça coûte quand-même 25 réais cette connerie, sans compter les sourcils, qui sont indispensables. C’est pour ça que j’ai préféré aller voir Gilsin la veille de mon voyage, pour être frais à NYC. D’où ma vieille coupe le jour du visa. »

(©Jessica Oliveira)

Sources :

http://next.liberation.fr/images/2016/03/25/favelas-tondeuses-a-garcons_1442052

http://www.hickduarte.com/chavosos/

https://i-d.vice.com/fr/article/tondeuses-et-chavosos-le-rituel-du-style-dans-les-favelas

[1] Musique paulista dérivée du baile funk et du rap, née en 2008.

(Re)découvrez la littérature sur les favelas

Je-suis-Rio-carré-reduite
couverture je suis favela
Je suis encore favela_Anacaona
Manuel pratique de la haine

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